We need to say that women have sex, have abortions, are at peace with the decision, and move on with their lives. We need to say that is their right, and, moreover, it's good for everyone that they have this right: The whole society benefits when motherhood is voluntary. Katha Pollit
La semaine dernière, plusieurs États américains ont émis des lois interdisant l’avortement. Ces lois non seulement punissent les femmes qui auraient recours à l’avortement, mais aussi les médecins qui pratiqueraient ces IVG. Les peines encourues peuvent aller jusqu’ à 99 ans de prison.
Je n’ai pas été vraiment surprise de lire ces nouvelles. Donald Trump, actuel président des États-Unis, s’était positionné contre l’avortement et souhaitait revenir sur l’arrêt de 1973.
Ce qui m’a le plus titillée, est que la vague d’indignation (légitime) qu’a créé cette loi était seulement dirigée envers les 50 hommes blancs (des sénateurs d’Alabama) ayant voté la loi. Pas un seul commentaire contre les deux femmes blanches à l’origine de la loi. Terri Collins a rédigé le projet de loi, que les 50 sénateurs ont validé. Puis Kay Ivey gouverneur d’Alabama a signé le bulletin de loi validé par les sénateurs, en faisant ainsi une loi effective.
Allons-nous ignorer ce fait ? Ignorer que deux femmes blanches ont été activement complices d’une immense violence faites aux femmes?
Il est bon de rappeler que 53% des femmes Blanches ont voté Trump à la présidentielle de 2016, tout en connaissant les positions de celui-ci sur l’avortement et les droits des femmes.
Elles ont sacrifié sur l’autel de la suprématie blanche, les femmes et leurs droits. En effet, bien souvent quand il s’agit des femmes blanches, la race passe avant le genre. L’élection de Trump et leur participation à cette loi anti IVG en sont encore des illustrations.
Vous vous demandez sûrement quel est le rapport entre l’interdiction de l’avortement et la race.
Cette loi anti avortement d’une sévérité cruelle est certes portée par des idéaux religieux (avorter est un péché). Mais elle est surtout une réponse à la théorie du Grand Remplacement qui a trouvé écho depuis de nombreuse années auprès des extrêmes droites européennes et américaines. D’autre part, de nombreuses études démographiques ont démontrés qu’à partir de 2050 il y’a de grandes chances pour que la population issue des minorités dépasse la population blanche. Cela est certes causée par l’immigration mais aussi et surtout par le fait que les femmes blanches américaines font moins d’enfants que les femmes racisées américaines. Les femmes blanches ont en moyenne 1.7 enfants par femme, contre 2.2 enfants par femme pour les femmes racisées.
Cette loi anti IVG est motivée par le changement démographique que connaît les états-unis, et l’anxiété raciale que génère chez les républicains, cette théorie du Grand Remplacement.
La loi anti IVG, a donc pour but de limiter le recours à l’immigration. Si les femmes blanches font plus d’enfants, il n’y a plus besoin de main d’œuvre étrangère pour faire tourner l’économie du pays.
D’une autre part, les hommes de droite et extrême droite (militants et politiciens) pensent qu’en interdisant l’avortement, la natalité des femmes Blanches augmentera.
Leur but est d’imposer leur version de la famille traditionnelle: blanche, chrétienne avec plusieurs enfants.
Pour ainsi faire face à « l’invasion des populations étrangères » et à. « l’exterminations des peuples Européens/des Blancs (aux USA) »
Cependant, les démographes ont constaté que l’avortement n’a aucun effet sur la natalité. On ne peut pas inverser la courbe démographique d’un pays, simplement en autorisant ou interdisant l’avortement.
Prenons le cas de l’Irlande, l’avortement était interdit jusqu’à décembre 2018. Ce qui n’a pas empêché le taux de natalité de chuter. A partir de 1950, il a chuté jusqu’à atteindre les 1,85 enfants par femme, avant de remonter légèrement à 1,92 enfant par femme. Conclusion: Ce n’est pas en interdisant l’avortement que les femmes Blanches feront plus d’enfants.
Il convient de souligner l’hypocrisie des soi disant militants pro life Américains. Ils ne s’émeuvent pas des stérilisations forcées des prisonnières Afro-Américaines en Californie, des Portoricaines, et des Natives. Si l’utérus de toutes les femmes américaines importait vraiment, les pro- Life auraient déjà causés des tollés d’indignation. Je me dois de rappeler qu’ils ne se soucient guère du taux élevé de mortalité des Afro-Américaines lors de l’accouchement. Aucun commentaire à cet égard et aucune mesure n’a été prise pour résoudre le problème. Pourtant, ils devraient s’en soucier. N’est-ce pas eux qui nous répètent sans arrêt que la vie humaine est précieuse et qu’avoir un bébé est une bénédiction ?
Il devient de plus en plus claire que les pro- Life ne se soucient que d’un seul type de vie: la vie des personnes blanches. La bonne maternité a toujours été vue comme « Blanche/Européenne) et ce depuis l’esclavage et la colonisation (où les femmes autochtones devaient suivre un modèle maternel européen).
Quant à la stérilisation forcée des femmes non Blanches, ce phénomène ne se limite pas aux États-Unis. Il est répandu dans le monde:
—Les femmes Natives sont stérilisées au Canada, —Israël a stérilisé des Éthiopiennes, les femmes —Roms sont stérilisées dans certains pays d’Europe de l’Est, —les Réunionnaises à qui on a imposé stérilisation et avortement dans les années 1970, etc.
La stérilisation des femmes non blanches, et le fait de les forcer à avorter sont vus (et a toujours été vu) comme un contrôle des naissances, un moyen de limiter le nombre « d’envahisseur ». Et non comme un crime devant être puni.
Cette prévalence de la vie blanche, et de la maternité blanche sur toutes les autres, expliquent la différence de traitement entre les femmes Russes qui accouchent sur le sol américain, pour que leurs enfants obtiennent la nationalité, et les femmes Centreoamericaines qui font de même.
On critique très durement les migrantes Centroaméricaines qui accouchent sur le même sol. On les accuse de vouloir profiter du système. Tandis que les Russes qui accouchent aux E-U ne sont pas si durement vilipendées. Pourtant profitent-elles pas aussi du droit du sol et du système ? De plus, on n’entend pas les droites et extrêmes droites parler de Grand remplacement par ces femmes russes et leurs bébés.
Trump a même dit haut et fort qu’il souhaite plus d’immigrés en provenance d’Europe: c’est à dire des Blancs toujours dans le but de résister « l’envahisseur »(c’est également le cas du Brésil). Vous constaterez que les Blancs ne sont pas considérés comme des envahisseurs, même quand ce sont des immigrés.
En outre, les pro life interdisent l’avortement, mais ils ne proposent rien derrière pour aider les mères et leurs enfants. On force des femmes à mener une grossesse non désirée à terme, mais que se passe il après l’accouchement ?
Y aura-t-il des lois pour responsabiliser les hommes, et les forcer à prendre en charge ces enfants non désirés ?
En parlant des hommes, si le but est vraiment d’éviter « le meurtre » d’enfant lors de l’avortement, pourquoi ne proposerait-on pas la vasectomie aux hommes? Sachant qu’un homme peut causer 100 grossesses en 1 année, et une femme ne peut être enceinte qu’une fois par an. C’est bien plus logique que la solution à l’avortement soit le contrôle du corps masculin.
C’est beaucoup trop facile de faire porter le chapeau aux femmes alors qu’un enfant ça se fait à deux. En plus, l’IVG est souvent perçu comme un choix égoïste de la femme, mais les pro-life seraient surpris de voir le nombre d’hommes étant en faveur de l’IVG quand leur partenaires tombent enceintes, et qu’ils ne désirent pas l’enfant. Les femmes ne sont pas les seules bénéficiaires.
Quel type de mère deviendront ces femmes à qui on a imposé un enfant ? J’espère que les pro life ne s'attendent pas à une maternité joyeuse, ni à de l’amour, surtout quand l’enfant est issu d’un viol/inceste.
Ils nous répètent sans cesse que chaque vie humaine est sacrée, mais derrière ils ne proposent rien pour le bien-être des familles et des femmes. Proposeront ils plus de lois pour améliorer l’éducation ? réformer le système de santé ? On ne les entend pas évoquer le sort des familles monoparentales où les mères subsistent seules avec leurs enfants. Comment on fait avec plus de bébés ? Un bébé c’est de l’argent, du temps et de l’amour. Lorsqu’aucune de ces conditions n’existe, que se passe il ?
La réalité est que les avortements continueront. Il y aura toujours d’autres issues pour celles souhaitant avorter:
—voyager pour aller avorter dans un autre État/pays,
— le faire clandestinement par des moyens tous plus dangereux les uns que les autres.
Ces avortements clandestins comportent des risques telle que la stérilité définitive, des traumatismes irréversibles et la mort. Évidemment celles qui sont le plus vulnérables sont les femmes pauvres et racisées.
En attendant, je ne veux plus entendre dire « les femmes ont tous les droits en Occident » alors que même en France nous avons des élus comme François-Xavier Bellamy (LR) qui s’opposent à l’IVG. Les pro vie ne sont pas en faveur du choix, ils imposent uniquement leur choix fondé sur leur religion et leur vision politique. Chaque femme devrait être libre de faire ce que lui semble bon de son utérus, de son corps, de sa vie.
Photo : Seated woman with Two Female Servants,

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